La biologie des entreprises résilientes
Les éléphants ont très peu de risques de développer un cancer, alors qu’ils ont cent fois plus de cellules que les humains et vivent presqu’aussi longtemps. Des chercheurs ont récemment découvert la sur-représentation du gène TP53 chez les pachydermes. Les cellules éléphantines ne sont pas moins atteintes par des mutations pathologiques, mais quand c’est le cas, elles sont programmées pour s’autodétruire immédiatement. Chaque cellule de chaque éléphant sait ce qu’elle a à faire en cas d’altération, et ceci garantit la survie de l’espèce.
Cette découverte, prometteuse pour la santé humaine, inspire également d’autres réflexions passionantes sur la pérennité des entreprises, dès lors qu’on les considère comme des écosystèmes.
Les entreprises familiales centenaires, voire plus que bicentenaires (Les Henokiens) sont nos éléphants. En dépit de leur longévité, des transmissions successives et des agressions économiques, militaires, financières…, elles sont toujours – pour une bonne part d’entre elles – dynamiques, modernes, vivantes! Quel secret de résilience se cache dans leurs gènes?
Arie de Geus, auteur du concept d’entreprise apprenante, s’est interrogé sur ces entreprises vivantes, leur pérennité rivalisant avec leur performance. Parmi les points communs notables, il pointe ceux-ci:
Elles apprennent sans cesse, elles se posent à tout moment la question : « Que ferons-nous en telle circonstance » ? et dessinent simultanément des plans d’action. Cette « mémoire du futur » sert de moteur d’adaptation aux aléas de l’environnement. Elles préservent à travers leurs métamorphoses une identité forte. Elles cultivent l’autonomie, la décentralisation des décisions des personnels et des partenaires. Elles manifestent enfin une très grande prudence financière, privilégiant l’investissement constructif par rapport à la spéculation.
La fidélité à l’identité et à la culture est le pivot de ces belles et longues histoires entrepreneuriales. Il faut savoir raconter et conter l’entreprise, pour ancrer et faire vivre son ADN, quoi qu’il arrive. La résilience des entreprises repose sur ce souffle du mythe transmis par les anciens aux équipes actuelles; ce mythe unit par un lien de sens le passé, le présent et le futur; ce lien n’enferme pas les évolutions des sociétés dans leur passé glorieux, mais … passé; il est souple et cohésif. Cette trame invisible permet l’autonomie et une gestion des risques éclairée (la mémoire du futur qu’évoque Arie de Geus).
Toutes les entreprises n’ont pas vocation à être pérennes. Elles ont toutefois pour la plupart une raison d’être et une valeur ajoutée qui dépassent le destin personnel de leur dirigeant, qui est un passeur, un griot à son service, un créateur de nouveaux liens.
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